Nées dans les milieux méditerranéens au XIIe siècle, les cartes marines, dessinées sur parchemin, représentent la succession des ports et des mouillages le long des rivages. Elles ont accompagné les navigateurs européens jusque dans leur exploration du monde au XVIIIe siècle et illustrent les intérêts économiques et politiques des puissances maritimes européennes d'alors.
Avec leur abondance d'ors, d'enluminures et d'ornements, les portulans, ces somptueuses cartes marines nées vers le XIIIe siècle dans les ports de Majorque, Gênes ou Venise, et qui accompagnèrent les Européens dans leurs premiers grands voyages de découverte des nouveaux mondes, fascinent autant l'amateur que le spécialiste.
Puisant dans la collection exceptionnelle de la BNF - près de cinq cents documents -, L'Âge d'or des cartes marinesprésente, avec quatre-vingts de ses plus belles «cartes portulans», une vue d'ensemble des écoles qui se sont succédé jusqu'au XVIIIe siècle. Sans compter la fameuse «carte pisane», la plus ancienne, on découvre ici, parmi bien d'autres, cinq trésors cartographiques : l'Atlas catalan (1375), le planisphère du Génois Nicolò de Caverio (vers 1505), l'atlas portugais dit Atlas Miller (1519), la Cosmographie universelle du Havrais Guillaume Le Testu (1556) et la carte du Pacifique du Hollandais Hessel Guerritsz. (1622).
À travers les éléments d'un système graphique complexe qui permettait aux marins de s'orienter et de faire le point, on déchiffre avec délices, le long des rivages, la succession des noms de ports et mouillages, tandis qu'à l'intérieur des continents les peuples et les moeurs, la faune et la flore, les paysages des nouveaux mondes se révèlent au fil des découvertes de l'Afrique, de l'océan Indien, des Amériques et du Pacifique, le long des nouvelles routes vers les îles aux épices de l'Extrême-Orient. Car les premières représentations des terres et des peuples lointains ne doivent pas qu'à une indéniable curiosité ethnologique : ces images enluminées illustrent aussi clairement les rivalités pour l'hégémonie politique, culturelle et économique des grandes puissances maritimes européennes qui ont aiguillonné les navigations européennes et l'exploration du monde jusqu'au XVIIIe siècle.
Bénéficiant des contributions d'une quinzaine de spécialistes européens, cet ouvrage propose un regard élargi sur les nouveaux défis des traversées transocéaniques qui ont transformé les traditions cartographiques antiques du Grec Ptolémée ou celles des prédécesseurs arabes ou asiatiques. On y comprend comment, à partir du contournement de l'Afrique par Bartolomeu Dias en 1488 et des explorations de Vasco de Gama dix ans plus tard, les relevés des navigateurs du XVIe siècle ont permis aux compagnies commerciales européennes (notamment la Compagnie des Indes néerlandaises, la célèbre VOC) d'infiltrer le très riche marché contrôlé par les navigateurs arabes, persans, indiens et indonésiens. Et, tout en suivant les aléas de cette expansion formidable de la puissance européenne sur l'ensemble du globe, on est captivé par les rêves qui s'attachèrent à ces entreprises extraordinaires.