En montant sur le paquebot de croisière Luxuosa, le narrateur devient Lola. Elle y rencontre Charles, un employé malgache. Le jour, elle observe la vie à bord, allégorie du monde moderne : infantilisation, incitation à la consommation, inégalités sociales, etc. La nuit, Lola rêve d'activités de loisirs qui dégénèrent en séances de torture collective. Peu à peu, les deux récits convergent.
Lu-xuo-sa : ces trois syllabes légèrement nauséeuses pourraient désigner une maladie - « J'ai attrapé une Luxuosa carabinée » -, ou bien, à l'inverse, un médicament - « As-tu pris ton Luxuosa ? ».
C'est ici le nom d'un gigantesque paquebot de croisière où, sans savoir pourquoi, embarque Lola, belle grue cendrée, sagace et indépendante, chaussée de Converse et portant un sac Tati à rayures rouges et blanches.
Comme dans W de Georges Perec, deux récits alternent, chacun trouvant son sens dans le miroir de l'autre : au fil de diverses rencontres, agréables ou terrifiantes, Lola s'aperçoit que ce bâtiment, à la fois centre commercial et base de loisirs, est régi par « un plan business » et « un système infantilisant Playmobil® ». Dans le second récit, imbriqué au premier comme les nuits succèdent aux jours, les cauchemars de Lola tissent une trame sans défaut : y figurent un camp de prisonniers, un centre de tri, un navire évoquant le Luxuosa, d'anodines séances de gymnastique dégénérant en torture collective, un casino sanglant donnant sur un aquarium à requins. Une seule pensée obsède alors Lola : s'évader.
Sur le mode du conte ou de l'allégorie, ce livre est une fable contemporaine dont la morale serait, pour paraphraser une formule célèbre : « Un spectre hante le monde : les loisirs. » Car une utopie inversée cul par-dessus tête se profile à l'horizon de ces pages : dans le meilleur des mondes possible, nous serons bientôt tous sous Luxuosa.